MAUVAISE PASSE

De Michel Blanc avec Daniel Auteuil,
Stuart Townsend, Liza Walker,
Frances Barber, Claire Skinner...

Durée 1h40

Daniel Auteuil a un statut très particulier en France. Choisissant ses films avec une rare délicatesse qui le font passer de grosses productions (Le Bossu) à des oeuvres beaucoup plus fragiles (La Fille Sur Le Pont) sans que pour autant sa cote de sympathie n'ait à en souffrir. Et si l'année dernière il travailla avec Patrice Leconte qui fut le premier à filmer l'équipe du Splendide, le voilà maintenant sous la direction d'un des vétérans de la troupe puisqu'il s'agit de Michel Blanc que l'on ne présente plus même si le grand public aura du mal à le reconnaître comme signataire de cette oeuvre plutôt noire. N'oubliant pas que Blanc a toujours su osciller entre Jean-Claude Dus et M. Hire et qu'il n'est donc pas "just a rigolo" que nous voulons bien prétendre. Enfilant pour la troisième fois la casquette de réalisateur pour cacher une légère calvitie, il a oublié sa grosse fatigue pour une dérive dure mais maîtrisée.

Je ne te jette pas la pierre, Pierre... mais il est vrai que la vie que tu mènes n'est pas franchement euphorisante. C'est ce qu'a dû se dire notre héros pour quitter femme, enfants, patrie et se retrouver à Londres sur un coup de tête. Espérant écrire pour s'en sortir alors que ses pages restent désespérément blanches ou sans intérêt, il traîne dans les rues et son moral est bien bas surtout en Angleterre où il fait plus souvent -12° dans le brouillard que 51° au soleil. Il va alors rencontrer Tom, trop beau pour être honnête, qui va l'entraîner dans l'univers des accompagnateurs et autres gigolos. Pierre d'abord refroidi comprendra bientôt qu'il fait meilleur sous les draps et que le plantet de bâton ne se pratique pas qu'au ski. S'il filme avec habileté cette histoire forte, c'est que le réalisateur n'est pas tout blanc dans l'histoire puisqu'il en est aussi le seul auteur. S'entourant d'une équipe anglaise qui travailla, pour certains, avec Ken Loach, nous sentons que le cinéaste a voulu filmer au plus près des gens tout en soignant l'esthétique et le cadre. Daniel Auteuil est une fois de plus remarquable par une interprétation sans faille d'un homme qui en possède beaucoup et nous retrouvons aussi Frances Barber que Michel Blanc avait connu dans Chambres à Part. Dans cet univers plus sombre sa mauvaise passe va droit au but et ce n'est pas comme Oueldec...